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Payer n’est pas posséder

Scénario classique : une société fait appel aux services d’une agence de communication ou d’un prestataire free-lance aux fins d’obtenir un logo et des cartes de visite pour se créer une identité visuelle.

Quelques temps plus tard, la même société décide de créer un site internet.

Le prestataire rappelle à cette occasion à sa cliente que pour décliner son logo et sa charte graphique sur internet, il lui faudra payer à nouveau, car elle n’a pas acquis les droits nécessaires.

La société s’insurge et soutient avoir commandé une prestation et l’avoir payée : en conséquence, elle estime pouvoir faire ce qu’elle veut avec son logo.

Le prestataire maintient sa position…et les relations se tendent !

Qui a raison ?

La question consiste ici à déterminer qui détient les droits sur une création commandée, payée, le tout dans un cadre de relations entre professionnels.

La société-cliente considère en toute bonne foi qu’ayant payée pour la prestation de création, elle est légitime à utiliser le résultat de sa commande comme elle l’entend.

C’est faire fi d’un principe immuable du droit français : la propriété corporelle de l’œuvre – le paiement de l’acquisition d’une charte graphique, par exemple, n’entraine pas l’acquisition des droits d’auteur sur l’œuvre : l’acquéreur ne possède ni le droit de reproduction, ni le droit de représentation, rien qui lui permette de l’utiliser sur Internet.

On pense parfois à tort que les prestataires de communication, ne réalisant que des créations de commande à des fins commerciales ou publicitaires, ne disposent pas de droits sur leurs créations.

C’est oublier que la loi protège toutes les œuvres et leurs créateurs quels qu’ils soient.

Peu importe que la finalité de la création soit purement économique.

Il n’y a pas de distinction entre l’art à proprement parler, et l’art appliqué à la communication et à la publicité.

Et selon la loi, un auteur possède deux types de droits : droits patrimoniaux et droits moraux.

La simple livraison de la commande n’emporte pas cession des droits sur l’œuvre.

Quand bien même la prestation effectuée a été payée et le support livré.

Il est par conséquent indispensable de régulariser une cession car, en droit français, la cession de droits ne se présume jamais.

En l’absence de cession, toute utilisation des créations d’un prestataire de communication expose à des risques car la violation de droits d’auteur est constitutive de contrefaçon.

Face aux abus procéduraux que la loi peut engendrer, on est en droit de se demander si, aux fins de sécuriser les relations commerciales, il ne serait pas opportun que le droit d’auteur se mâtine de pragmatisme.

Pourquoi ne pas imaginer une dévolution automatique des droits au client lorsque ce dernier aura réglé le coût de la prestation commandée ?

Cela aurait le mérite de la clarté juridique, et n’emporterait pas nécessairement de manque à gagner pour les prestataires puisque le prix de la prestation tiendrait compte de cette cession automatique.

En toute hypothèse, cela contraindrait à la négociation et donc à la transparence, et à ce titre, tout le monde y gagnerait.

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