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Quelques commentaires sur la loi de lutte contre la contrefaçon

Dans un climat des plus consensuels, la loi du 29 octobre 2007, transposant la directive du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, a été adoptée. Elle concerne tant la propriété industrielle – brevets, marques, dessins et modèles – que la propriété littéraire et artistique – le droit d’auteur -, les appellations d’origine et les indications géographiques.

Elle traite donc de tous les droits de propriété intellectuelle.

Ses buts affichés sont de faciliter les poursuites en cas de contrefaçon et de sanctionner plus sévèrement les contrefacteurs: la contrefaçon ne doit définitivement plus être attractive.

Deux points essentiels ressortent de l’examen du texte de loi.

 

Des moyens accrus pour les autorités judiciaires

Afin de prouver la réalité matérielle de la contrefaçon ou d’obtenir sa cessation, la loi accordait déjà aux victimes un certain nombre de moyens : saisie contrefaçon, saisies douanières, mesures provisoires. La nouvelle loi complète l’arsenal judiciaire, tout en l’étendant à d’autres personnes que le contrefacteur.

Ainsi, a été créé un droit à l’information permettant aux autorités judiciaires d’exiger des personnes trouvées en possession de marchandises contrefaites qu’elles fournissent des informations sur les quantités et prix de ces marchandises, sur leurs détenteurs antérieurs et sur leurs destinataires.
La très large définition de ces informations devrait permettre de démanteler efficacement les réseaux.

Par ailleurs, la procédure de saisie contrefaçon a été étendue à des domaines qui lui échappaient jusqu’alors.

De même, il sera désormais possible pour le juge d’interdire la poursuite des actes de contrefaçon ou de subordonner la poursuite de l’activité arguée de contrefaçon à la constitution de garanties, tel qu’un cautionnement. Ces mesures provisoires seront également envisageables à l’encontre des intermédiaires ayant fourni leurs services, et ce, au moyen d’une procédure non contradictoire.

Dans sa lutte contre les réseaux de contrefaçon, le législateur français se révèle plus sévère que son homologue européen.
La directive prévoyait en effet la sanction des seuls actes commis à l’échelle commerciale, c’est-à- dire destinés à obtenir un avantage économique ou commercial direct ou indirect.

Cela excluait de facto les actes perpétrés par des consommateurs finaux agissants de bonne foi.
Estimant que le concept d’échelle commerciale était une notion ambiguë qui pourrait susciter un abondant contentieux, le législateur français l’a tout simplement supprimée.

 

L’amélioration de la réparation du préjudice consécutif à la contrefaçon

On l’a dit, la nouvelle loi a pour objectif de rendre la contrefaçon moins attractive.

Sans aller jusqu’à institutionnaliser le principe anglo-américain des « dommages et intérêts sanction », le législateur se donne les moyens de réparer plus justement le préjudice de la victime de la contrefaçon.

Jusqu’alors, la jurisprudence admettait la réparation du gain manqué, c’est-à-dire le bénéfice perdu par le titulaire du droit de propriété intellectuelle sur les ventes manquées du fait direct de la contrefaçon.
Mais il n’était pas question de lui allouer directement les bénéfices réalisés par le contrefacteur.

Désormais, la juridiction prendra en considération non seulement le manque à gagner subi par la victime mais également les bénéfices réalisés par le contrefacteur.
Il s’agit d’une petite révolution dans les principes d’allocution d’une réparation civile.

La loi prévoit en outre que la victime pourra solliciter une indemnisation forfaitaire au moins égale au montant des redevances contractuelles qu’un licencié aurait dû acquitter.

Le juge pourra enfin accorder aux demandeurs des dommages et intérêts provisionnels lorsque l’existence du préjudice n’est pas sérieusement contestable, voire prononcer une saisie conservatoire si le demandeur justifie de circonstance de nature à compromettre le recouvrement des dommages et intérêts, tels que des risques d’insolvabilité.

Cette loi est résolument tournée vers les entrepreneurs frustrés par des décisions judiciaires insuffisamment satisfaisantes, qui hésitaient à défendre par la voie du procès leurs droits de propriété intellectuelle.

Gageons qu’ils trouveront dans ces nouveaux moyens mis à leur disposition, l’efficacité nécessaire au respect des droits de propriété intellectuelle, ainsi que le promettait la directive européenne.

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